mercredi 6 mars 2013

Amélie Poulain et l'humour américain


Cette semaine est dédiée à la découverte du cinéma dans nos classes de langue.

J'ai choisi de projeter Le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain, tout en leur laissant le choix parmi une sélection de Jacques Audiard (Un Prophète, De Rouille et d'Os), Lucchini (Les Femmes du 6ème Étage), et de Jean-Pierre Jeunet (Amélie, Un Long Dimanche de Fiançailles), évidemment. Ne pouvaient être retenus que des films disponibles au laboratoire, j'ai longtemps hésité avec du politiquement incorrect en montrant OSS 117, mais je me suis ravisée, sait-on jamais, la réaction d'étudiants pourrait s'avérer violente, quand on sait que certains s'offusque devant du Klapisch lorsqu'on leur propose L'Auberge Espagnole.

Ça en dit long je crois sur nos différences culturelles.

J'ai pu observer pourtant certaines réactions auxquelles je ne m'attendais pas avec Amélie Poulain. 

Les réactions à l'humour notamment. Est-ce parce qu'ils sont plus jeunes, ou sont tentés de rire en même temps qu'un petit groupe pour ne pas se sentir en décalage ? Toujours est-il que les scènes qui ne me font pas rire ont été celles qui ont eu le plus grand succès, notamment celle de la mort de la mère d'Amélie sous le corps d'une touriste québécoise suicidaire, et le dérapage dans les toilettes des Deux Moulins entre Georgette la buraliste hypocondriaque et Joseph l'amant éconduit par Gina. 
La douceur et la délicatesse des sentiments n'ont, d'après ce que j'ai pu voir, pas touché grand monde. Peut-être, par pudeur, ne laissent-ils exploser que les émotions fortes, jugées peu personnelles finalement (encore que cela soit perçu comme intime au point de se couvrir les lèvres dans certaines cultures), et intériorisent-ils le reste. Évidemment que le rire est culturel, je ne l'apprends à personne.

Peut-être que je réagis aussi fortement parce que le film me touche, ayant passé ces deux dernières années à Paris, à Montmartre, et notamment aux Deux Moulins rue Lepic et ayant emprunté la station des Abbesses je ne sais combien de fois.


Finalement, je me sens un peu comme Du Bellay exilé à Rome : il encensait et mythifiait la ville de ses rêves et trouvait peu d'intérêt à la France, mais une fois hors de chez lui, c'est la déception, et son pays retrouve crédit à ses yeux, le rendant tout à coup nostalgique. 
Je suis très loin de l'excès témoigné par le poète, et les États-Unis ne finiront jamais de me surprendre et de me fasciner, mais je dois reconnaître que je redécouvre mon pays sous un angle nouveau et m'aperçois que je suis offensée lorsque quelqu'un se permet de railler nos manifestations, nos 35-39h hebdomadaires et la qualité de nos universités. 


Alors j'ai versé ma "larmiche" en classe, évidemment, mais un red velvet cupcake cuisiné par un de mes étudiants a su me consoler.

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